Jacques Villeglé

Jacques Villeglé, né Jacques Marie Bertrand Mahé de La Villeglé le 27 mars 1926 à Quimper et décédé le 6 juin 2022 à Paris, était un peintre et plasticien français reconnu pour son travail novateur avec les affiches lacérées. Provenant d'une famille de vieille bourgeoisie bretonne, il a grandi dans un environnement culturel riche qui influença son parcours artistique. Son éducation artistique débuta à l'École régionale des beaux-arts de Rennes, où il rencontre le futur ami et collaborateur Raymond Hains. C'est dans les années 1940 qu'il commence à s'intéresser au monde des affiches, récoltant des débris du Mur de l'Atlantique. De 1950 à 1954, il travaille sur le film inachevé 'Pénélope' et commence à créer des graffitis sur des pellicules de film. Il devient membre du mouvement Nouveau Réalisme en 1960, privilégiant une approche d'appropriation à travers les affiches abandonnées et lacérées. Sa production artistique couvre plus de 200 expositions à travers le monde, faisant de lui une figure majeure de l'art contemporain, honoré par le titre de Commandeur des Arts et des Lettres en 2019.

L'œuvre de Jacques Villeglé est particulièrement caractérisée par son utilisation d'affiches lacérées, qu'il considère comme une forme d'art populaire et accessible. Il pratique ce qu'il appelle le 'Lacéré anonyme', s'appropriant des oeuvres d'autres sans se revendiquer comme l'artiste créateur au sens traditionnel. Il se considère plutôt comme un archiviste ou un 'archéologue de la rue', restituant des fragments de mémoire collective à travers ses collages d'affiches trouvées. Villeglé opère une sélection minutieuse des affiches en prenant en compte leur datation, mais laisse également place à l'intervention de passants qui ajoutent des graffitis ou des modifications, ainsi l'œuvre devient une interaction collective. Les affiches sont souvent assemblées sur des toiles, créant un dialogue plastique entre couleur, forme et histoire. Sa signature artistique comprend souvent la date et le lieu de collecte, reléguant son nom au second plan, afin de souligner l'anonymat des véritables créateurs des affiches qu’il récupère. Villeglé explore également la typographie, créant un alphabet socio-politique à partir des signes et symboles qu'il trouve dans la culture urbaine. Son engagement social et politique transparaît dans ses œuvres, qui interrogent le statut de l'art et le rôle de l'artiste dans la société de consommation.

Jacques Villeglé a eu une influence significative sur l'art contemporain, en particulier dans le mouvement du Nouveau Réalisme et plus largement sur le développement du Pop Art en France. Son approche originale des affiches lacérées a ouvert la voie à d'autres artistes explorant l'appropriation et le collage, faisant de lui un précurseur lors de l'évolution artistique des années 1960. Son observation critique des éléments urbains et des dynamiques sociales lui permet de réunir artefacts de la mémoire collective, remis au goût du jour dans une esthétique graphique moderne. Le titre même de 'Lacéré anonyme' est une énonciation d’une pratique qui valorise l’anonymat et l’héritage culturel au-delà de l’artiste individuel. En tant que figure emblématique de l'art engagé, son travail a inspiré des générations d'artistes à réfléchir sur la relation entre l'art, la société, et l'objectivité des conditions matérielles. Son décès en 2022 a marqué la fin d'une ère, mais son héritage perdurera à travers ses œuvres qui continuent d’interroger la culture visuelle contemporaine.

Au cours de sa carrière, Villeglé a participé à de nombreuses expositions, tant personnelles que collectives, dans des institutions renommées. Sa première exposition au musée a eu lieu en 1978 et il a continué à captiver le public avec des œuvres emblématiques présentées dans des lieux tels que le Centre Georges-Pompidou, le musée des beaux-arts de Montréal, et le musée Sainte-Croix. En 1999, sa participation à l'exposition 'Pop Art' au musée des beaux-arts de Montréal a renforcé son statut de figure de proue dans le domaine de l'art contemporain. En 2007, il a été inclus dans l'exposition 'Le Nouveau Réalisme' aux Galeries nationales du Grand Palais à Paris. En 2016, lors de la FIAC, une de ses œuvres emblématiques, '14 juillet, décembre 1960', a été mise en avant au musée du quai Branly, témoignant de sa pertinence continue dans les dialogues culturels. Des expositions rétrospectives, telles que celle au musée d’art contemporain de Marseille en 2012 et 'Jacques Villeglé. La Comédie Urbaine' au Centre Pompidou, ont également contribué à célébrer son immense contribution à l'art visuel et à la culture.