Théophile Alexandre Steinlen

Théophile Alexandre Steinlen, né le 20 novembre 1859 à Lausanne, en Suisse, est un artiste emblématique du mouvement Art nouveau. Fils de Samuel Steinlen, un employé des Postes, et petit-fils d'un peintre, il baigne dès sa jeunesse dans un environnement artistique. Initialement, il étudie la théologie à l'Université de Lausanne pendant deux ans avant de se tourner vers l'art en 1879, suivant une formation au dessin d'ornement industriel à Mulhouse. En 1881, il s'installe à Paris avec sa femme Émilie et s'installe sur la butte Montmartre en 1883. Là, il fréquente des personnalités artistiques de renom tels qu'Henri de Toulouse-Lautrec et Aristide Bruant, et devient un membre actif du cabaret Le Chat Noir. Steinlen se distingue par ses œuvres qui capturent la vie quotidienne, dépeignant des scènes de la rue, des travailleurs, ainsi que les animaux, en particulier les chats, qui deviennent un motif récurrent dans son œuvre. Son style se caractérise par le réalisme, l'utilisation du pastel et des dessins qui mettent en évidence la misère sociale et les injustices. Naturalisé français en 1901, il développe un engagement politique fort, se rapprochant du mouvement anarchiste et dénonçant les inégalités sociales à travers ses illustrations et affiches. Steinlen meurt le 13 décembre 1923 dans le 18e arrondissement de Paris, laissant derrière lui un héritage artistique riche et diversifié.

L'œuvre de Steinlen se distingue par une approche réaliste de la représentation de la vie urbaine à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. Utilisant principalement le dessin, le pastel, la lithographie et l'affiche, il capture des moments de la vie quotidienne avec un regard empathique pour les laissés-pour-compte, notamment les ouvriers, les mendiants et les prostituées. Ses œuvres témoignent d'une observation minutieuse et d'une sensibilité exacerbée envers la condition humaine. Les chats occupent une place prépondérante dans son travail, représentés dans des postures variées qui reflètent leur étrangeté et leur caractère comique ou mélancolique. Steinlen explore également des thèmes politiques et sociaux, créant des lithographies qui illustrent les injustices de son époque, comme celles vécues durant la Première Guerre mondiale, où il se rend au front pour dessiner la souffrance des soldats et des civils. De plus, son usage des couleurs et des formes dans ses affiches contribue à l'esthétique Art nouveau, mêlant esthétisme et message politique fort, engageant le spectateur à réfléchir sur la société et ses maux.

L'impact de Steinlen sur l'art et la culture visuelle de son temps est immense. En tant qu'affichiste, il influence non seulement le design graphique, mais également la manière dont l'art peut être utilisé comme moyen de communication sociale et politique. Ses affiches, en particulier celle de la Tournée du Chat Noir, deviennent emblématiques et témoignent de l'esthétique populaire de la Belle Époque. Son travail inspire la génération d'artistes qui suivra, y compris des figures majeures comme Pablo Picasso et Jean Peské, qui reconnaissent l'importance de son style réaliste et engagé. L'œuvre de Steinlen trouve également écho dans le monde contemporain, où ses thèmes de lutte sociale, de justice et d'égalité continuent de résonner. Avec des expositions rétrospectives dans des institutions prestigieuses, son héritage perdure, faisant de lui une figure essentielle dans l'historiographie de l'art moderne et un modèle pour les artistes sociaux et engagés d'aujourd'hui.

Plusieurs expositions mettent en lumière l'œuvre de Steinlen, prouvant sa place importante dans l'histoire de l'art. Parmi les plus significatives : "Le Bel héritage, rétrospective 1885-1922" au musée de l'Histoire vivante à Montreuil-sous-Bois en 1987 ; l'exposition "Dans la vie" au musée d'Art Roger-Quilliot à Clermont-Ferrand en 1998 ; et "Steinlen, l'œil de la rue" au musée cantonal des beaux-arts de Lausanne en 2008. Ces expositions permettent d'évaluer l'évolution de son travail et d'apprécier la profondeur de son engagement social. La rétrospective prévue au Musée de Montmartre en 2023 vise à célébrer le centenaire de sa disparition en rassemblant une large sélection de ses œuvres, illustrant son impact durable sur la scène artistique française et internationale. Son œuvre continue d'être étudiée dans le cadre de l'histoire sociale et politique, rendant hommage à son engagement et à sa vision artistique unique.